Malgré les paroles de Larme de Lune, la femelle écaille-de-tortue ne sembla pas se calmer. Au contraire, elle regarda la grise avec une lueur d'angoisse dans les yeux. Tout d'un coup, elle détala. La guerrière pensait qu'elle avait affaire à la chatte la plus frapadingue des quatre Clans, aussi, elle ne tenta pas de la suivre. Sauf quand elle se rendit compte que la fugitive filait droit vers... la falaise ! A une telle vitesse elle ne pourrait jamais s'arrêter avant la chute. Lorsque Mélodie Angélique se rendit compte que sa camarade de Clan la suivait, elle galopa deux fois plus vite. C'était à peine si ses pattes touchaient le sol. Elle ne put donc pas freiner au bon moment. Larme de Lune voulait bien l'aider mais, que faire quand un chat vient de se jeter de vingt mètres de haut? Sauter pour le rejoindre est totalement irrationnel, non ? Mais la féline cendrée savait que si elle ne faisait rien pour secourir la guerrière, elle s'en voudrait pour toute sa vie. Elle retint sa respiration et sauta. Elle commença à regretter ce qu'elle avait fait. Elle fendait l'air dans sa chute, de l'air qui semblait être fait de ronces et de cactus. Elle regarda l'eau, qui n'était plus très loin d'elle. Du haut du précipice, la rivière semblait juste un ruban bleu-vert; seulement, plus on s'en rapprochait, plus on avait l'impression qu'on allait s'écraser sur du béton. Quand son pelage entra en contact avec le ruisseau, Larme de Lune se roula en boule comme un chaton.
Elle était alors tout au fond, au milieu des galets et des poissons. Elle n'avait pas eu le temps de prendre sa respiration, donc ses poumons la brûlèrent vite. Elle pagaya avec ses pattes afin de regagner la surface.
Une fois la tête en dehors de l'eau, elle prit une grande bouffée d'air et regarda autour d'elle si elle voyait Mélodie Angélique. Elle ne tarda pas à voir une tache rousse dépasser de l'eau. Elle nagea jusqu'à elle et plongea comme un canard pour l'en sortir. La courant était très fort et la chatte grise n'avait presque plus de forces; elle était obligée de se laisser emporter.
Cinq minutes, voire dix minutes se passèrent avant que la guerrière ne puisse regagner un petit banc de sable. Elle en fut d'abord très heureuse mais paniqua lorsqu'elle sentit l'odeur du Clan de la Rivière tout autour d'elle. Elle était en territoire ennemi! Et vu l'heure, ils avaient surement déjà envoyé une patrouille. Justement, on entendait des voix et des graviers qui crissaient sous des coussinets. Larme de Lune s'empêcha de justesse de crier, mais ne put réprimer un petit glapissement.